En ce premier dimanche de l’année, il est d’usage de se souhaiter les vœux. Certains cherchent à faire des vœux personnalisés selon les personnes qu’ils rencontrent, d’autres disent simplement « bonne année ! », d’autres évitent soigneusement cette tradition qu’ils considèrent mondaine et presque superstitieuse. Nous ne savons pas toujours ce qu’il convient de souhaiter, nous ne savons parfois même pas ce que nous voudrions pour nous-mêmes ! Bien sûr, la santé arrive en général en tête de liste… mais finalement pour beaucoup, nous sommes mal à l’aise avec cette histoire de vœux.
Mal à l’aise car une bonne année est forcément une année vécue avec Dieu, alors souhaiter une bonne année à nos connaissances non-chrétiennes nous semble un peu hypocrite. De plus, Dieu peut choisir de ne pas nous accorder la santé pour diverses raisons, cela fera-t-il de notre année une « mauvaise année » forcément ? Quel devrait être notre état d’esprit à l’ouverture d’une nouvelle année finalement ? Nous faut-il prendre de bonnes résolutions ? Nous faut-il faire comme si de rien n’était et éviter la « tradition » ? Nous faut-il ré-évaluer notre conduite et comment ? Je crois que cette période est l’occasion d’exprimer notre reconnaissance pour l’année qui précède mais aussi d’espérer pour l’année qui vient et de re-positionner parfois nos priorités, nos choix, la direction que nous donnons à notre vie. Enfin, c’est une opportunité réelle pour nous poser et réfléchir au temps qui passe et à la fidélité de Dieu. Pour nous accompagner dans cette réflexion, nous lirons les paroles et la prière d’un illustre personnage : Moïse, l’homme de Dieu.
Je vous invite à la lecture du Psaume 90, psaume qui nous parle du temps qui passe mais aussi de la fidélité de Dieu sur qui le temps n’a pas de prise.
* Lecture
« Ça ne me rajeunit pas ! » : Voilà une expression qu’on entend souvent. Peut-être certains parmi vous se sont fait cette réflexion en voyant les chiffres former l’année 2025. Et effectivement, le processus de vieillissement et le temps qui passe inexorablement, sont inéluctables. Nous le savons, et même si dans notre société, beaucoup de choses sont imaginées pour le retarder, le contrer ou même l’inverser, le temps continue à filer et à marquer nos corps, nos visages et nos vies. Le temps, d’ailleurs, est une notion tout à fait fascinante car c’est une notion fluctuante, subjective. Le temps n’existe que pour celui qui en a conscience et qui y est assujetti. Les animaux, par exemple, n’ont aucune conscience du temps qui passe. Certains insectes ne vivent qu’une journée mais ils ne le savent pas. Le livre de l’Ecclésiaste nous dit que Dieu a mis dans le cœur de l’homme la pensée de l’éternité, et c’est cette conscience-là qui change tout pour nous. Nous savons que notre vie prendra fin et cette fragilité ajoute de la valeur au temps dans lequel nous vivons. Et en même temps, sans la notion d’éternité, cette conscience du temps est absurde, « vanité » disait l’Ecclésiaste !
Il est presque certain que ce psaume a été écrit par Moïse, vers la fin des 40 années d’errance au désert. Moïse savait ce que signifiait devenir vieux, il était lui-même proche de 120 ans, et il avait vu une grande partie de son peuple mourir dans le désert. Il avait même enterré son frère, Aaron. Il avait vu des choses incroyables, mais aussi de grandes difficultés. Il avait expérimenté l’amertume, la frustration mais aussi la joie et l’émerveillement. Il avait vu des naissances et pleuré de nombreuses morts. Oui le temps passe, aujourd’hui comme hier, souvent trop vite.
Pour autant, ces jours et années qui défilent ne devraient pas nous conduire au regret mais plutôt à la reconnaissance et même à l’espérance. Certains semblent ne pas du tout y penser, vivant leur vie comme si elle ne devait jamais s’arrêter. Ces personnes-là sont qualifiées d’« insensées » dans l’Écriture, notamment dans la bouche de Jésus en Luc 12 : 20 : « Insensé ! Cette nuit-même, ton âme te sera redemandée… ». Ainsi ceux qui ne reconnaissent pas Dieu pour ce qu’Il est vivent-elles leurs vies en pensant toujours qu’il leur reste beaucoup de temps : un jour, elle réfléchiront à l’existence de Dieu, un jour elles se convertiront, mais pour l’instant, elles sont jeunes et en bonne santé et entendent bien « profiter » de la vie ! Notons dès à présent que cette notion de « profiter » qu’on entend partout n’a rien de commun avec l’exhortation à « compter nos jours » présente dans ce psaume. C’est même plutôt l’inverse ! Profiter pour nos contemporains, c’est dépenser, gaspiller, tenter de ne se soucier de rien ; c’est une fuite en avant, un endormissement de la conscience, pour ne pas avoir à penser à la mort, à l’éternité, à Dieu. Or c’est justement en pensant à la mort et à l’éternité que le temps prend toute sa valeur. Cette conscience du temps et les questions métaphysiques que cela soulève est ce qui nous différencie des animaux, entre autres !
D’autres encore comptent leurs jours, mais pas de la bonne façon : ils le font par peur, par superstition, ils craignent ce que l’avenir leur réserve à savoir la maladie, le deuil, la souffrance, etc., et ce faisant ils ne vivent pas vraiment… Ils vivent à moitié, à petits pas, la peur au ventre. Eux courent le risque de l’angoisse et de la dépression, quand Jésus nous appelle à la liberté et au repos !
Dans ce psaume, Moïse veut nous inviter à compter nos jours dans une juste perspective, perspective qui nécessite de considérer Dieu pour qui Il est ; avec sa souveraineté, son éternité, sa sainteté, sa justice, sa miséricorde et sa grâce, notamment.
Si nous connaissons ce Dieu là, le Dieu qui s’est révélé en la personne de son Fils Jésus-Christ, alors notre regard sur la brièveté de nos vies change radicalement ! Déjà parce que notre vie a un sens, elle n’est pas due au hasard, elle n’est pas absurde. Elle a une origine – l’amour de Dieu – et un but – la gloire de Dieu – ; toute chose, toute question trouve son éclaircissement dans le plan éternel de Dieu.
Oui notre vie a un sens, et les œuvres que nous entreprenons aussi, à partir du moment où elles sont placées sous le regard de Dieu et qu’elles ont pour objectif Sa gloire.
Est-ce que nous nous posons la question de la gloire de Dieu, quand nous prévoyons, planifions, entreprenons, construisons ? Ne serait-ce pas là la meilleure des résolutions ? Faire tout pour la gloire de Dieu ! Ce genre de décision permet un tri assez évident dans les choix et les décisions qui s’offriront à nous tout au long de l’année…
Notre vie entière est entre les mains de Dieu puisqu’Il est le Créateur. Nous ne sommes maîtres ni de notre vie, ni de notre mort. Nous sommes assujettis au temps mais ce n’est pas le cas de Dieu qui existe de toute éternité. Dieu n’a besoin de rien ni personne pour exister, ni pour continuer d’exister ; IL EST. Voilà qui est insaisissable pour nous, et qui marque aussi la différence incommensurable entre Dieu et nous. Dieu est Tout-Autre, que ce soit en ce qui concerne le temps mais encore la puissance, la sainteté, la justice, la bonté, etc. N’importe où que l’on regarde, Dieu est différent de nous. C’est justement ce qui permet, avec une pleine et entière assurance, de s’appuyer sur Lui, et de dire avec Moïse : « Seigneur ! Toi, tu as été pour nous un refuge (ou une demeure) de génération en génération ». La perfection, l’éternité, l’absence de variation du Seigneur sont des points d’ancrage solides et sûrs pour nous qui sommes si inconstants, si fragiles.
Nous devons considérer la justice et la sainteté de Dieu qui ont le péché en horreur, mais nous devons aussi prendre en compte sa miséricorde et sa grâce qui nous sauvent en Jésus-Christ. Oui, quand nous regardons à Dieu, les choses s’éclairent et prennent une toute autre dimension. Alors bien sûr, nous allons mourir un jour, mais pas pour toujours nous dit l’Évangile (Jean 11 : 25-26) ! Et chaque jour qui nous est donné est une occasion de ressembler davantage à Jésus, mais aussi de témoigner de Sa grâce à ceux qui nous entourent, afin qu’eux aussi ne soient plus prisonniers de la mort. Face à la vieillesse d’un croyant, c’est la grâce de Dieu que nous contemplons, un Dieu qui ne change pas (Ésaïe 46 : 4) ! Et chaque fois que nous fêtons le passage à une nouvelle année, c’est aussi la fidélité de Dieu qui nous est donnée à voir ; une fidélité et une patience qui nous offrent une nouvelle année de grâce en Sa présence et sous Son regard.
Quand Moïse fait cette prière, il regarde à Dieu, il regarde à l’homme, et il demande trois choses : la sagesse, la miséricorde de Dieu et Sa bénédiction.
La sagesse, d’après le livre plus tardif des Proverbes, commence avec la crainte de Dieu, c’est-à-dire le fait de le reconnaître comme Dieu et de le respecter. La sagesse implique donc la connaissance. On ne peut respecter ou reconnaître quelqu’un qu’on ne connaît pas. Pour acquérir la sagesse, il faut donc chercher Dieu, chercher à le connaître – aussi bien par la compréhension que par l’expérience – car c’est quand Dieu se révèle dans tous ses attributs que l’émerveillement commence, avec le respect et donc la sagesse. La sagesse, en même temps, nous permet de nous voir nous aussi tels que nous sommes : mortels, fragiles, pécheurs, non aimables.
Ce contraste entre qui est Dieu et qui est l’homme est au cœur de ce psaume comme de beaucoup d’autres (Psaume 8 : 5), il permet de prendre conscience que nous ne pouvons pas compter sur nous-mêmes ; nous ne pouvons compter que sur Dieu car justement, Il n’est pas un homme !
Voilà ce qui conduit à la deuxième requête.
Si la sagesse nous fait prendre conscience de notre état face à la perfection de Dieu, la miséricorde de Dieu est, quant à elle, le seul remède possible à cet état de fait. C’est parce que « l’Éternel est un Dieu de grâce et de compassion, lent à la colère, riche en bonté et en vérité » (Exode 34 : 6), que nous pouvons attendre de Lui notre secours, alors même que nous savons ne pas le mériter.
« Il fait preuve de patience, ne voulant pas qu’aucun périsse, mais que tous parviennent à la repentance » (2 Pierre 3 : 9). Pour parler de cette miséricorde, Paul dit ceci : « Mais voici comment Dieu prouve son amour envers nous : alors que nous étions encore des pécheurs, Christ est mort pour nous » (Romains 5 : 8).
Ainsi réconciliés avec Dieu en Jésus-Christ, nous pouvons demander Sa bénédiction.
« Si Dieu est pour nous, qui sera contre nous ? » demande l’apôtre Paul en Romains 8 : 31.
Désirer la bénédiction de Dieu, c’est aussi désirer voir Son œuvre et contempler Ses actions (Psaume 90 : 16). Est-ce ainsi que nous prions ? Désirons-nous contempler la face de l’Éternel, comme le demandait Moïse ? Désirons-nous voir ses œuvres et le montrer à nos enfants ? Voulons-nous voir Sa main sur nos vies et celles de nos familles, sur ce que nous entreprenons ?
Ce psaume est, au fond, une incitation à persévérer dans la prière, en se fondant sur la fidélité de Dieu à qui rien n’est impossible (Luc 1 : 37) ; non seulement pour nos vies, mais aussi pour nos œuvres. Rien de ce que nous entreprenons ne peut aboutir sans la bénédiction de Dieu, ce Dieu qui est un refuge pour tous ceux qui se confient en Lui.
Dieu est un refuge, un abri solide et sûr ; non seulement pour toi ou moi, mais pour une succession de générations qui le connaissent et placent leur confiance en Lui. C’est ce que souligne l’épître aux Hébreux en parlant d’« une si grande nuée de témoins » (Hébreux 12 : 1).
La fidélité de Dieu dépasse notre compréhension, et c’est justement ce qui fonde notre confiance et notre espérance. Les Israélites étaient invités à dire, redire, raconter à leurs enfants les merveilles de Dieu, afin qu’ils puissent placer à leur tour leur confiance en ce même Dieu (Psaume 78 : 3-8) ; c’est aussi ce que nous sommes appelés à faire. Nous sommes des témoins de la grâce et de la fidélité de Dieu, et c’est à-travers nous que certains, pour la première fois, vont entendre parler de ce Dieu merveilleux qui a tout créé, qui nous aime et veut nous sauver.
La prise de conscience de cette fidélité de Dieu est d’autant plus incroyable que notre condition mortelle est le résultat de notre désobéissance, de la rupture entre l’homme et Dieu causée par le péché. Cette séparation, ce jugement de Dieu sur l’homme se transmet de génération en génération. Ainsi, si ce n’était par la libre volonté de Dieu qui, par amour, choisit de nous sauver, nous serions perdus et sans aucun espoir de changement. Seules les perfections qui existent en Dieu apportent la solution à ce mal. Et ces perfections nous sont acquises par l’œuvre de Jésus-Christ, mort à la croix pour payer la dette que nécessite notre péché, et ressuscité pour nous revêtir de sa justice. Ainsi, dit l’apôtre Paul : « ce n’est plus moi qui vis, c’est Christ qui vit en moi. » (Galates 2 : 20).
Alors oui, nous pouvons être reconnaissants, quand Dieu nous fait la grâce, comme aujourd’hui, de contempler ensemble Son action sur nos vies et nos œuvres. « C’est de lui, par lui et pour lui que sont toutes choses » (Romains 11 : 36).
Qu’Il continue de nous enseigner à « bien compter nos jours, afin que notre cœur parvienne à la sagesse » (Psaume 90 : 12).
« Que la tendresse de l’Éternel, notre Dieu, soit sur nous ! Affermis pour nous l’ouvrage de nos mains ! Oui, affermis l’ouvrage de nos mains ! » (Psaume 90 : 17). Amen.
Je récapitule ici les « résolutions » que nous trouvons dans ce psaume et qui nous permettront avec certitude de ne pas avoir perdu notre temps : Chercher à connaître Dieu davantage et à ressembler à Christ, acquérir la sagesse. S’appuyer sans cesse sur la miséricorde et la grâce de Dieu manifestée en Jésus-Christ. Demander la bénédiction du Seigneur pour contempler Son œuvre dans nos vies et celles de nos proches. Enfin, avoir pour seul objectif la gloire de Dieu ! Tout ceci est repris et résumé dans le mot d’ordre de notre année qui est maintenant affiché sur le mur : (lire la bannière) !