Prédication du 20 octobre 2024.

Prédication apportée par notre pasteur Clémence Bury.

20 oct. 24 – Tite 2, 11-15

Entre le salut et la gloire, n’oublions pas de grandir !

* Prière

La semaine dernière, avec le texte de Romains 4 et les exemples d’Abraham et David, nous avons exploré la justification par la foi sous deux angles : foi et justice, et foi et promesse. Cela nous a conduit à comprendre comment Dieu nous voit, mais aussi à réaliser que nous n’avons aucun mérite. Ainsi sommes-nous entrés dans le mystère insondable de la grâce de Dieu pour nous.

Le texte que nous allons lire aujourd’hui nous parle aussi de la grâce qui a été révélée. Cette grâce nous enseigne à renoncer, à vivre et à attendre. Il nous parle donc aussi de l’espérance qui est la nôtre, quand, justifiés par la foi, nous appartenons à Jésus-Christ.

* Lecture

« En effet, la grâce de Dieu, source de salut pour tous les hommes, a été révélée. Elle nous enseigne à renoncer à un mode de vie impie et aux convoitises de ce monde et à vivre dans le temps présent conformément à la sagesse, la justice et la piété en attendant notre bienheureuse espérance, la manifestation de la gloire de notre grand Dieu et Sauveur Jésus-Christ. Il s’est donné lui-même pour nous afin de nous racheter de toute faute et de se faire un peuple qui lui appartienne, purifié et zélé pour de belles œuvres. Dis ces choses, encourage et reprends avec une pleine autorité. Que personne ne te méprise. »

Tite 2 : 11-15

Ce court passage nous décrit en réalité le chemin de la maturité chrétienne, chemin qui commence après que nous ayons reçu, par grâce, la révélation du salut pour nous-mêmes. Ceci est d’une importance capitale car, trop souvent, les chrétiens s’arrêtent au salut et, ce faisant, ils se trompent d’objectif. L’objectif, comme le décrit Paul dans le chapitre 4 de l’épître aux Ephésiens, c’est la maturité, l’accomplissement, la ressemblance à Christ :

« jusqu’à ce que nous parvenions tous à l’unité de la foi et de la connaissance du Fils de Dieu, à la maturité de l’adulte, à la mesure de la stature parfaite du Christ ». v. 13

Le salut, mes amis, c’est le point de départ, nous ne devons en aucun cas nous arrêter là !

Avant de considérer ce qu’est le salut, ce «grand salut», notons que ce passage nous parle de deux apparitions : D’abord de l’apparition de la grâce, descendue ici-bas pour apporter le salut ; ensuite de l’apparition de la gloire de notre grand Dieu et Sauveur Jésus Christ. La première apparition nous apporte le salut en grâce, la seconde le salut en gloire. Le salut en grâce a été parfaitement accompli dans le passé, le salut en gloire le sera parfaitement dans un avenir si prochain qu’il est déjà comme présent pour la foi (Phil. 3:20-21).

Ce qui se trouve entre les deux est le chemin de la maturité spirituelle.

(Cette prédication reprend en partie celle que j’ai donnée à la CCC en 2022).

Le salut en grâce

La grâce n’est pas la bonté de Dieu, ni même son amour, elle n’est ni un principe, ni une abstraction ; elle est le Dieu Sauveur dans la personne d’un homme, apparaissant de telle manière que tout homme a pu la voir et la recevoir. Elle n’est pas apparue pour exiger quelque chose de l’homme, mais pour lui apporter une chose inestimable, le salut ! Ce qui donne à la grâce cette valeur, c’est qu’elle est la grâce de Dieu. Elle est donc souveraine et parfaite ; la grâce de Dieu est éternelle comme Lui.

Le caractère de la grâce est absolu. Il n’est pas dit qu’elle apportera, ni même qu’elle a apporté, mais qu’elle apporte. Cela fait du salut, parfaitement accompli, une chose actuelle, immuable, qui ne peut être ni changée ni révoquée. Mais de plus, elle est apparue à tous les hommes. Sa portée est universelle et personne n’en est exclu.

Cette gratuité du salut contredit toutes les pensées de l’homme depuis la chute. Jamais son orgueil ne voudra accepter que le don de Dieu ne lui coûte rien. Il acceptera facilement un Dieu Sauveur qui lui commanderait de conquérir le salut, ou lui offrirait son aide pour l’obtenir, ou enfin lui enseignerait les divers moyens de l’acquérir. Il comprendra un salut, résultat de son zèle pour les bonnes œuvres, mais jamais un salut entièrement gratuit. L’homme voudrait offrir quelque chose, même très peu, afin de l’obtenir et de pouvoir s’en vanter ensuite.

Mais revenons au salut lui-même. Pour le croyant, le salut n’est pas seulement le pardon des péchés qu’il a commis. Dans leur immense majorité, les chrétiens s’arrêtent à cette vérité première et passent leur vie sans avoir connu la véritable délivrance. Cette dernière est, non pas le pardon des péchés, mais l’absolue délivrance du péché, de la racine même qui est en nous. Cette délivrance est opérée en ce que Christ, ayant été fait péché à notre place, notre vieille nature a été condamnée et crucifiée dans sa personne. Nous pouvons donc désormais nous tenir pour morts au péché et «il n’y a maintenant aucune condamnation pour ceux qui sont dans le Christ Jésus». Et de ce fait, toutes les conséquences du péché : l’esclavage de Satan, la mort et le jugement, ont été réduits à néant pour toujours ! C’est ce qui était décrit, la semaine dernière, par les derniers mots de Romains 4, disant que Jésus est « mort pour nos offenses et ressuscité pour notre justification » v. 25.

Mais, quelque grande que soit cette délivrance, le salut est encore bien plus que cela. Il n’est pas seulement la délivrance du péché et de toutes ses conséquences passées, présentes et futures ; il est l’introduction actuelle du croyant dans la présence de Dieu, sa réception, selon l’entière acceptation de Christ, en vertu de son œuvre, par Dieu lui-même — acceptation publiquement déclarée en ce que Dieu a ressuscité Jésus d’entre les morts et l’a fait asseoir à sa droite.

Enfin le salut est l’introduction encore future dans la jouissance parfaite de toutes les choses que nous ne possédons encore qu’en espérance et qui vont être manifestées dans la gloire (Phil. 3:20-21). Tel est le salut que la grâce nous apporte !

Le chemin de la maturité

La grâce a commencé par apporter le salut à tous les hommes ; elle nous enseigne ensuite. Le croyant se trouve désormais, non pas comme Israël sous l’enseignement de la Loi, mais sous celui de la grâce qui est apparue en Jésus-Christ. Ce nouvel instituteur n’est en aucune manière donné au monde. Il faut d’abord que les hommes soient sauvés par la foi et ce n’est qu’alors qu’ils peuvent être enseignés. Ceux qui ont été sauvés forment désormais une nouvelle famille qui a besoin d’éducation, qui a besoin de progresser, qui a besoin de grandir. La grâce s’en charge ; aussi trouvons-nous ici ce petit mot : nous enseignant ou plutôt d’après le grec (paideuo) « nous éduquant », qui est de toute importance. Dieu n’enseigne pas le monde, mais les justes. Sans doute il «enseigne le chemin aux pécheurs» (Ps. 25:8), c’est-à-dire à ceux qui, reconnaissant leurs transgressions font appel à sa grâce et à son pardon. Lorsque, dans cette qualité, ils s’approchent de Dieu et mettent leur confiance en Lui, il les compte parmi les «humbles». Nous ne pouvons donc pas attendre d’un non-croyant une maturité spirituelle, pas plus qu’une ressemblance à Christ.

Jamais il ne pourra exister un terrain d’entente entre le péché et la grâce, car ils sont entièrement opposés l’un à l’autre. La grâce n’améliore pas le pécheur, elle le sauve. Le péché sépare l’homme de Dieu, la grâce l’amène à Dieu. Le péché asservit l’homme à Satan, la grâce le libère de cet esclavage. Le péché produit la mort, la grâce donne la vie éternelle. Le péché conduit l’homme au jugement, la grâce lui apporte la justice. Le péché a pour conséquence la condamnation, la grâce ôte cette dernière pour toujours.

Voyons maintenant en quoi consiste l’enseignement de la grâce :

Elle nous enseigne quant au passé, quant au présent, quant à l’avenir : quant au passé, à renier l’impiété et les convoitises mondaines ; quant au présent, à vivre dans le présent siècle sobrement, et justement, et pieusement ; quant à l’avenir à attendre la bienheureuse espérance. Renoncer, vivre, attendre, voilà le chemin de la maturité, comme je le disais en introduction. C’est un chemin de vie, de toute notre vie, qu’il nous faut non seulement emprunter mais dans lequel il nous faut persévérer, avec l’aide de Dieu et le secours du Saint-Esprit. Habituellement, les trois verbes que j’utilise pour parler de la maturité spirituelle sont des verbes que l’on trouve dans le livre de la Genèse, et qui sont utilisés pour parler du mariage. Il s’agit des verbes « quitter, s’attacher, devenir », qui ne sont pas, vous le constatez, sans rapport avec nos verbes « renoncer, vivre et attendre ». Et le fait que les premiers soient utilisés pour décrire le mouvement du mariage, et donc de l’alliance, n’est pas sans importance, au contraire ! De la même façon que dans le mariage on quitte un ancien mode de vie et de relations pour s’attacher à une personne et devenir ensemble un foyer de vie, un couple, « une seule chair », dans l’alliance avec Dieu on quitte aussi une façon de vivre, on renonce à nous-mêmes et à tout ce qui nous attirait loin de Dieu, pour s’attacher à Lui et vivre conformément à Sa volonté, et enfin devenir une nouvelle créature en attendant Son retour en gloire.

Cet enseignement de la grâce est, comme on le voit, entièrement pratique, ce qui caractérise tout l’enseignement de cette épître.

Toute la marche chrétienne, enseignée par la grâce, se trouve comprise entre le point de départ du croyant — la croix, et son point d’arrivée — la gloire. Cette marche est désormais étrangère à tout ce qui avait caractérisé notre conduite loin de Dieu. Il s’agit de renoncer à tout ce qui ne vient pas de Dieu, à commencer par notre Moi, notre égoïsme, notre orgueil et de vivre en nouveauté de vie, « conformément à la sagesse, la justice et la piété ». Nous n’appartenons plus au monde, car nous sommes du ciel, une nouvelle création. Nous sommes son peuple.

Enfin, la grâce nous apprend à attendre la venue du Seigneur pour nous enlever auprès de Lui. Nous attendons l’espérance. C’est ce que nous considérons maintenant.

Le salut en gloire

Le v. 13 nous rappelle que la position du chrétien ici-bas est en état d’attente : l’Église attend l’apparition de son Sauveur, qui sera aussi glorieuse pour le Seigneur lui-même et pour ses rachetés que sa première apparition avait été humble et remplie d’opprobres et de souffrances (comparer Philippiens 3.20 ; Philippiens 3.21).

Cette pensée, cette attente habituelle est nécessaire pour détruire en nous « les convoitises mondaines » et y développer la vie chrétienne et sainte dont l’apôtre vient de retracer les principaux caractères (Tite 2.12).

« Le Seigneur, en nous appelant au ciel, nous retire de la terre » (J. Calvin).

La foi en effet change notre compréhension du temps. Le temps présent, le temps dans lequel nous vivons, est inscrit entre deux épiphanies : la manifestation de la grâce de Dieu (acte qui a été posé, accompli) et la manifestation de la gloire de notre grand Dieu et Sauveur, qui constitue notre attente. Sagesse, justice et piété sont les fruits d’une compréhension particulière de ce temps. De même la pureté du v. 14 est un fruit de la grâce, un don de Dieu. En Christ, Dieu me voit pur… il me reste alors à devenir ce que je suis ! C’est ce que nous avons développé dimanche dernier.

La grâce est donnée, la gloire est à venir. Pour l’instant, cette gloire n’est pas encore pleinement manifestée et « notre vie est cachée avec le Christ en Dieu » (Col. 3 : 3-4).

Ce que nous attendons, notre espérance, c’est la manifestation de la gloire […]. Cela nous décentre de nous-mêmes ! Car parfois, quand nous parlons du retour du Seigneur, nous mettons l’accent sur ce que cela va nous apporter à nous !

Nous pensons à la fin du mal, des larmes et de la mort, nous pensons au jugement des méchants ou au renouvellement de la création, nous pensons à la vie éternelle et spéculons sur ce que nous y ferons et avec qui…

Or ici nous sommes invités à changer de point de vue. Nous n’attendons pas premièrement notre délivrance ou la fin des douleurs de la création – même si tout cela est biblique et bon – nous attendons premièrement Dieu qui révèle la gloire de son Fils, tout le bien que Dieu pense de son Fils. Comment est-ce que cela peut avoir de la valeur pour nous comme attente, à nous qui sommes bien souvent si égoïstes ? La réponse est dans ce qui précède : Parce que la grâce nous aura éduqués à attendre ça, à le désirer ! Parce que ce qui nous importe ce n’est plus nous-mêmes mais Christ et Christ seul ! Parce que nous désirons de tout notre être voir la gloire de notre grand Dieu et Sauveur Jésus-Christ !

Ce qui peut surprendre ici, c’est que l’apôtre nous exhorte à « attendre l’espérance », ce qui peut paraître contradictoire en soi, et d’ailleurs, l’espérance, les chrétiens l’ont déjà. Mais l’expression devient claire si l’on observe que ce mot espérance est souvent employé pour l’objet de l’espérance, que Paul désigne ici lui-même « comme l’apparition de Jésus-Christ. »

Le terme grec (prosdecomai) traduit par « attendre » parle bien de « recevoir quelqu’un, de laisser entrer, de s’attendre à l’accomplissement des promesses ».

Il s’agit donc de rééduquer notre désir ! Nous n’attendons pas quelque chose, mais quelqu’un ! Ou plutôt si, nous attendons quelque chose qui concerne quelqu’un : « la manifestation de la gloire de notre grand Dieu et Sauveur Jésus-Christ » !

Est-ce bien là ce que nous attendons ? Attendons-nous encore seulement quelque chose ?

Car c’est bien le problème dans le monde dans lequel nous vivons ! Tout est fait pour que nos espérances, nos attentes, soient placées dans les choses périssables… un meilleur travail, une belle maison, un corps plus jeune, une réussite familiale et professionnelle qui se voit, etc.

Ce texte, une fois de plus, nous invite à sortir de nous-mêmes pour regarder à Christ. Il nous invite à laisser les choses de la terre, à ne pas nous placer comme le centre de l’univers, mais à tout regarder, à tout considérer à travers le regard de Dieu. Et ce regard mes amis, ne peut que nous conduire à fixer le Christ, à la contempler, à l’adorer. Tout ce que fait Dieu, tout ce qu’il dit, tout ce qu’il pense, Il le fait en Christ, pour Christ, par Christ ! Et il faut qu’il en soit de même pour chacun de nous, que nous soyons occupés de Christ, et de Christ seul !

Que ce soit hier, aujourd’hui ou demain, tout ce qui m’importe c’est Christ et son œuvre. Martin Luther disait qu’il nous fallait vivre comme si Christ était mort hier, ressuscité aujourd’hui et qu’il revenait demain.

Combien cela changerait notre regard sur le monde, ses joies et ses peines si nous vivions ainsi ! Combien cela changerait la nature de nos désirs aussi ! Plus d’attachement aux choses de ce monde puisque nous sommes attendus ailleurs, plus d’envie de se faire un nom ici-bas ! Non, notre seul désir serait bien de plaire à Dieu et d’attendre des cieux le retour de son Fils bien-aimé, notre grand Dieu et Sauveur Jésus-Christ qui revient manifester sa gloire et sa magnificence !

« Ainsi nous ne serons plus de petits enfants, ballottés et emportés à tout vent de doctrine, par la ruse des hommes et leur habileté dans les manœuvres d’égarement. Mais en disant la vérité dans l’amour, nous grandirons à tout point de vue vers celui qui est la tête, Christ. » Eph. 4 : 14-15

Que Dieu nous donne de contempler son Fils, l’auteur de notre salut ; que nous sachions bien compter nos jours et vivre ce temps intermédiaire entre la manifestation de la grâce et la manifestation de la gloire en ayant les yeux fixés sur Jésus et en cherchant chaque jour davantage à devenir semblables à Lui ! Amen.